Dans le Livre de Dieu se trouve donc notre nom, et avec cela, un territoire qu’il nous donne, et qui évolue selon les saisons de nos vies. Ce territoire n’est pas une zone de confort, mais une zone sur laquelle il nous appelle à exercer son autorité. On parle pour cela du metron, la dose ou mesure de foi, d’autorité. L’apôtre nous dit ceci dans son épître aux Romains : « Par la grâce qui m’a été donnée, je dis à chacun de vous de n’avoir pas de lui-même une trop haute opinion, mais de revêtir des sentiments modestes, selon la mesure (metron) de foi que Dieu a départie (= assigné) à chacun. Car, […] nous avons plusieurs membres dans un seul corps, et […] tous les membres n’ont pas la même fonction. » (Romains 12,3-4)
Lisons encore dans 2 Corinthiens 10,13-15a : « Pour nous, nous ne voulons pas nous glorifier outre mesure, mais seulement dans la limite du champ d’action (metron) que le Dieu [de mesure (metron) nous a assigné en nous amenant jusqu’à vous. Nous ne dépassons point nos limites, comme si nous n’étions pas venus jusqu’à vous ; car c’est bien jusqu’à vous que nous sommes arrivés avec l’Evangile de Christ. Nous ne nous glorifions pas des travaux d’autrui qui sont hors de nos limites. »
Notre appel est lié à une zone délimitée et nous voyons clairement que ce metron est très personnel, une autorité assignée directement par Dieu. La traduction française ne rend pas vraiment justice au grec ici, puisqu’elle occulte dans la majorité des versions l’expression « Dieu de mesure » qui est importante. Cela parle de précision, d’équité, de justesse de Dieu. Cette « mesure » évolue avec les expériences de la vie chrétienne. Plus nous aurons l’audace d’accomplir l’appel de Dieu, plus notre metron va grandir et en augmentant, en obéissant aux petites choses, le Seigneur va nous confier et nous donner d’accomplir des choses plus grandes et de gérer des territoires plus vastes (Matthieu 25,21). Encore une fois, c’est la marche de vie chrétienne. Aucun instructeur n’envoie quelqu’un soulever 100kg dès le premier essai. Le coach lui donne des objectifs progressifs : commencer par une barre simple à laquelle il ajoute des poids petit à petit. Au fer et à mesure que la musculature s’étoffe, les objectifs changent. Cela vaut aussi dans le domaine spirituel. Seulement, nous n’accomplissons pas les œuvres de Dieu par nos propres forces ou du fait de nos expériences seulement, car nous pouvons peu de choses à notre niveau humain. Mais le peu que l’on arrive à donner entraîne une réponse exponentielle de Dieu, c’est sa provision dans son appel, c’est sa puissance qui s’accomplit dans la faiblesse (2 Corinthiens 12,9).
Je le répète, quand Dieu envoie il pourvoit. Souvenons-nous que la mesure d’autorité que nous avons vient de lui. Engageons-nous donc avec assurance dans nos champs d’action, mais n’en sortons pas. Il ne faut pas se disperser en s’engageant dans des choses qu’on ne doit pas faire tout de suite. D’où l’importance de la prière, d’une relation personnelle avec Dieu pour connaître sa juste place et éviter les déchirures musculaires spirituelles ! Chaque individu a donc son propre appel, sa propre zone, et qui commence dans sa famille, dans son couple, auprès de ses enfants, avant tout autre ministère.
Le Seigneur assigne à chacun son metron et nous ne devons absolument pas vouloir ou envier le metron ou la réussite de nos voisins, nos frères et sœurs en Christ. Il ne doit pas y avoir de jalousie dans les choses de la foi. Car n’oublions pas que chacun a un appel personnel et complémentaire aux autres, mais aussi que chacun a payé le prix de son appel. Ce que je veux dire par là, c’est que pour obéir au Seigneur, il nous faut généralement déposer quelque chose à ses pieds, qui nous coûte, à commencer par notre volonté, une reconnaissance, des désirs, etc. Ce sont des heures passées à prier, étudier la parole, chercher la face de Dieu. Cela en vaut toujours la peine, mais ne nous laissons pas aller à envier les autres. Acceptons plutôt que nous sommes partenaires, membres d’un même corps mais aux fonctions différentes, et fixons nos regards sur le Seigneur qui nous conduits, chacun où il veut.
Maintenant, lorsque nous savons où aller et avons compris que le Seigneur s’occupe des détails, nous équipe et nous fortifie, alors les circonstances ne doivent plus avoir de pouvoir sur nous. Les oppositions doivent perdre leur force contre nous, et comme dit Paul : « Ô mort, où est ta victoire ? Ô mort, où est ton aiguillon ? » (1 Corinthiens 15,55)
A ce moment-là, avec ce recul sur les événements, nous serons capables comme le psalmiste « de contempler nos ennemis, tapis devant nous, lorsqu’ils s’élèvent contre nous, et nous pourrons entendre ceux qui font le mal sans en être saisis de crainte » (interprétation personnelle du Psaume 92,12). Nous ne serons plus soumis aux tribulations autour de nous, car nous connaitrons alors notre autorité, et notre espérance est vivante.
Un dernier point. Nous sommes d’accord et nous l’avons dit, par nos propres forces, nous ne pouvons pas grand-chose, pour ne pas dire rien. Nous avons l’appel de Dieu qui nous envoie, et je disais qu’il nous équipe et nous donne l’autorité sur l’ennemi et les circonstances. Le verset 11 du Psaume 92 nous assure de cela : « Et tu me donnes la force du buffle ; je suis arrosé avec une huile fraîche. »
C’est la version Segond, qui ne rend malheureusement pas toute la profondeur de l’hébreu dans ce cas précis. La première partie est mieux rendue par « Tu élèves ma corne comme un oryx ». La corne est très souvent synonyme de la force, d’où la traduction habituelle. C’est d’ailleurs généralement la gloire de l’animal qui en porte, c’est ce qui le rend puissant. Et le terme hébreu « re’em » parle non pas d’un buffle, mais de l’oryx. C’était à l’époque un animal majestueux dans la région du Moyen-Orient, l’Oryx blanc. Il avait cette capacité de vivre dans des milieux arides et hostiles, et avait la particularité d’être très rapide et de se savoir se défendre et vaincre les animaux sauvages lorsqu’il leur fait face, justement grâce à ses cornes puissantes. Donc lorsqu’il est dit ici que Dieu élève notre corne comme un oryx, nous pouvons entendre qu’il nous assure de la force au combat et de la victoire, même si nous ne sommes pas donnés gagnants par notre entourage, voire par nous-mêmes qui manquons souvent d’objectivité et d’indulgence en ce qui nous concerne. Parce que le Seigneur s’est engagé et nous soutient, parce qu’il élève notre force, nous pouvons être rempli d’assurance.
Mais la corne est aussi symbolique d’autre chose, l’onction. C’est en effet avec une corne que se pratiquaient les onctions d’huile. Nous lisons par exemple en 1 Samuel 16,13 : « Samuel prit la corne d’huile, et l’oignit (David) au milieu de ses frères. L’Esprit de l’Eternel saisit David, à partir de ce jour et dans la suite. »
L’onction d’huile est une consécration, ordonnée par Dieu, qui était faite sur les rois, les prêtres (sacrificateurs) et les prophètes. On la trouve également dans la loi de purification des lépreux. Dans les 4 cas, l’onction assure une position. Pour les 3 premiers, ce sont des fonctions particulières pour Dieu ; en ce qui concerne les lépreux, c’est le geste qui leur assure le retour dans le camp d’Israël duquel ils étaient exclus, le temps de leur maladie. Il y a donc toujours cette notion d’intégration ou réintégration à une place particulière. L’huile est un symbole du Saint-Esprit dans la Bible. Lorsque Samuel oint David pour le proclamer roi, il est précisé que l’Esprit de Dieu le saisit. Le verbe hébreu est « tsalakh » qui signifie « saisir, se précipiter », mais également « prospérer ». Et c’est exactement de cela dont il est question. Au moment de l’onction, David entre dans son appel de roi et l’Esprit de Dieu l’équipe pour le faire prospérer dans l’appel qu’il a pour sa vie. Que ce soit pour l’office du roi, du prêtre ou du prophète, mais aussi la position du lépreux purifié, lorsque cette huile est répandue sur nous, nous sommes alors prophétiquement revêtus d’une identité, d’autorité et équipés pour entrer dans un nouveau lieu, une nouvelle responsabilité. De la même manière, lorsque nous faisons l’onction d’huile aux malades dans nos églises, selon l’exhortation de Jacques 5, la personne qui le demande se replace ainsi sous le sang de Jésus, revendiquant l’action du Saint-Esprit dans sa vie en faveur de sa guérison promise et payée à la croix. C’est ce que dit le verset 11 de notre Psaume, que la corne est élevée par Dieu et « je suis arrosé avec une huile fraiche », « verte » selon les versions, mais en de toute manière abondante et prospère.
Alors comme David, le jeune berger choisi pour être roi d’Israël, recevons l’appel de Dieu pour nos vies et proclamons que : « L’Eternel est mon berger, je ne manquerai de rien. » Psaume 23,1